Monday, October 16, 2006

Sortie tel un SDF ! Direction le Périgord

28 Août 2006

Ainsi que ce soit à la façon de Coluche, à la façon de Don Bernardo ou à la façon médicalement correcte, vous avec compris que plus rien ne devrait me casser les couilles et encore moins les pattes à un canard mon animal fétiche.

Sortie d'un vrai SDF

Enfin la faculté m’a donné l’autorisation de sortir.
J'ai enfilé un slip « à la Reiser dans vieux dégueulasse », il ne fallait pas que ma cicatrice soit serrée, et cela laisse respirer les burnes. Par dessus j’ai jeté un short de l’Armée des Indes, pas tout à fait bouclé autour du gras du bide, et une paire de bretelles pour tenir le tout. J’enfile mes tongs, passe un petit sac à dos prends mes cannes et mon panier caraïbe car Séverine avait hier pris le reste et me voilà opérant mes formalités de sortie.

J’avais une allure de Bérurier dans Youkaidi Youkaida !

La caissière s’est demandée si ma carte de crédit était vraie et surtout si j’allais pouvoir payer le solde du forfait journalier à mes frais. Ouf ! C’est passé.
Le taxi que j’ai commandé a hésité à embarquer ce SDF. Je lui ai montré mon numéro d’ordre et un paquet de biffetons, ses yeux ont dit : montez !

Direction la gare.

J’ai une petite heure et demi avant le prochain train pour Poitiers, où je dois retrouver Augustin et Véronique de très vieux amis qui nous reçoivent quelques jours, Séverine Inès, et Max qui sont partis en voiture et moi qui arrive par le train.

Donc me voilà parti traînant la patte à la recherche d’une vraie gargote. Rien à faire je ne vois que Quick et Fast, pas un seul slow food, ni d’ailleurs de place assise. Je n’ai pas encore assez de force pour sortir rue du départ, où il y a de vrais restaurants, alors pas de repas un café et deux bouteilles d’eau.

Je cherche mon train et me voila assis. J’épuise un premier tube de Biafine. Le jambon est à point et rissolant. Je m’installe les pattes en l’air dans un wagon de première.

Arrivé à Poitiers, je reconnais les lieux, j’y ai passé trois mois en 1977 en formation au CHU.

Une sorte de SDF avec des cannes pose les pieds sur le quai. Augustin a du mal à me reconnaître, mais il pense que, derrière les cannes, ce doit être moi. On tombe dans les bras l’un de l’autre. Si moi je suis en SDF lui a la distinction d’un prof d’université. Vero elle n’a pas changé. Je suis ému.

Arrêt à une pharmacie pour prendre l’imposant dispositif nécessaire à me faire rissoler la cuisse puis direction la maison dans les Deux Sèvres.
A un moment je demande c’est Loin. - Oui. Mais on y est ! - En réalité le village s’appelle Loin.

Je suis reçu aux petits oignons, une infirmière prend soi de moi matin et soir. Nos hôtes nous préparent des plats dont j’ai rêvé pendant quinze jours et je prends mon premier verre de vin. J’ai l’impression qu’il me glisse jusqu’aux orteils.

Nous passons quelques jours. Comme ma plaie s’est refermée nous décidons de faire un peu de tourisme. Visite de cloître Plantagenet. Mais la grande affaire c’est un pèlerinage aux sources que je souhaite faire, à Moncoutant.

C’est un petit village en plein sur le bocage, où Hugues mon frère et moi, alors que nous étions bien petit avons passé un an et fait une découverte qui a déterminé notre vie future.

On ne doit pas faire de différence entre les joueurs de foot !

Je ne résiste pas à l’envie de vous la raconter comme je l’ai raconté devant un parterre de 250 personnes dont Césaire et Menil fondateurs de Tropique, en 2002, lors d’une sympathique fête préparée en l’honneur de mon ami Roland Suvelor.

« J’ai raconté un jour à mon ami Roland ce qu’a été pour mon frère Hugues, ici présent et moi, une véritable prise de conscience. Nous avions respectivement moi 9 ans, lui 7 ans et la guerre d’Algérie n’avait pas encore commencé.
Un médecin avait diagnostiqué que nous étions tous deux une ménagerie, porteurs de la quasi totalité de tous les parasites que la Martinique aie connue, de la bilharziose aux amibes, en passant par la vaste famille des invertébrés. Il parait que ces petites bêtes ne supportaient pas le changement d’air, et surtout l’hiver. Nous avions donc été envoyé en France pendant un an Hugues et moi.
Nous avons effectué une traversée en bateau, au cours de laquelle nous nous sommes frottés à des « english » et des « ponyoil » enfants qui ne parlaient qu’anglais ou espagnol, avec lesquels nous avons fini par constituer une joyeuse bande. Nous avons atterri dans un petit village des deux Sèvres chez un couple d’amis âgés de nos parents qui n’avaient pas eu d’enfants.
Ce village était à moitié catholique et à moitié protestant. Nous étions catholiques, on nous a orienté vers l’Ecole Libre. Dans ce village nos camarades d’école nous ont demandé, que dis je, nous ont sommé, de reconnaître d’un simple coup d’œil un catholique d’un protestant, le premier étant fréquentable et pas le second. C’était là chose quasi impossible à nos yeux non avertis. Mais était-ce une question d’œil ?
Hugues et moi, nous en avons discuté dans nos petites têtes d’enfants. Distinguer un blanc d’un noir comme chez nous, va encore, c’est assez facile de faire la différence, encore que pour certain ! Mais faire la différence entre deux fils de paysans poitevins l’un catholique et l’autre protestant alors là c’était vraiment absurde, d’autant que parfois les deux jouaient bien au foot, et c’est ça qui comptait surtout. Décidé, pour nous, pas de différence, à deux on pourra toujours se défendre si l’un ou l’autre est embêté pour ça. Notre sage décision a été acceptée avec soulagement par nos parents adoptifs car elle était protestante, et lui catholique.
Mais si c’est absurde de faire des différences entre les hommes pour la religion, nous sommes nous dit aussi dans nos têtes d’enfants, c’est tout autant absurde d’en faire de même entre blanc et noirs, d’autant que là aussi il y avait de bons joueurs de foot. Plus jamais nous n’avons accepté de faire de différence entre les joueurs de foot !! ».

Pour le moment pas question de foot. Ma jambe est arrivée couleur lie de vin. Après deux jours de repos elle est passée rouge sang de boeuf. Il y a du progrès !!

Déjà je dois repartir. Direction Sarlat.

Voyage en TGV jusqu’à Libourne puis teuf teuf qui permet de descendre en marche pour arroser les papillons et reprendre le train sans trop de problème.

Je suis invité chez Anne Laure Bibas, Luciano et Lena en Périgord Noir à Sarlat. Max Séverine et Ines s’y sont rendu en voiture.

Il s’agit par une cure de foi gras, magrets et autres plats de canard de chasser toutes les toxines qui pourraient encore persister et ainsi recouvrer la santé.
Le French Paradoxe disent les américains et les anglais qui viennent ici soigner leur cholestérol.

Et de fait la cure a l’air de marcher. Le canard m’a fait un véritable drainage lymphatique je dégonfle, et ma jambe rosit. Elle n’est plus du tout rouge vif, mais bronzée style amérindien. C’est marrant de comparer les deux jambes.

Je me demande si je ne devrais pas remplacer la biafine par de la graisse de canard ?

Je marche maintenant. Je ne danse pas encore le charleston, mais hier j’ai esquissé un petit calypso du meilleur effet.

Mes adieux à ma Tante Linotte.

Je suis fin prêt pour aller voir ma Tante Linotte de 102 ans à Bordeaux. Elle ne sait pas encore que j’ai été opéré, et que cela s’est bien passé. Elle est heureuse quand je le lui apprends.

Elle nous attend.

Je ne savais pas alors que c'est l'avant dernière fois que je la verrai !

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